Pilier du Freney, sur les traces d'un mythe du massif du Mont-Blanc

La mythique face Sud du Mont-Blanc (tracé du Pilier du Freney en rouge)
La mythique face Sud du Mont-Blanc (tracé du Pilier du Freney en rouge)

En cette fin d'été, malgré la fatigue j'ai envie de sortir en montagne pour moi. Louis me propose un créneau fin Août , et je lui propose le pilier du Freney. 

Histoire : l'histoire du pilier du Freney est associée à un grand alpiniste, Walter Bonatti. Je vous suggère de lire son livre "Montagnes d'une vie" et cet article en cliquant ici. L'histoire se termine mal, par la mort de la plupart des protagonistes, et retrace le combat de tout un groupe pour la conquète d'un sommet, et pour leur survie . Cela se passe en 1961, dans la face sud du Mont-Blanc.

(topo camptocamp)

 

Situation : Cette voie se situe dans la face sud du Mont-Blanc, on y accède en venant de Courmayeur (Italie), par le Val Veny. On se gare au parking au bout de la route (1560m) et on monte à pied au Refuge Monzino (2590m).


Il y a quelques années, lors d'une journée pluvieuse, j'ai lu un livre de Walter Bonatti, "Montagnes d'une vie". Ce livre m'a beaucoup touché, j'ai aimé la sincérité dans la retranscription des événements, autant au niveau des faits que des émotions. En cette fin Août, je propose à Louis (un ami de promo : son site internet) d'aller faire un tour dans la face sud du Mont-Blanc, ou plus précisément dans la mythique voie du pilier du Freney. Il est bien sur emballé. Je raccroche déjà un peu anxieux. Je regarde du coin de l'oeil ce livre sur mon étagère, mais je n'oserai pas le sortir pour relire le passage sur la tragédie du Freney. Je regarde et reregarde la météo, le créneau de beau temps est là.


C'est donc dimanche 27 Août que je retrouve Louis aux Houches, où nous laissons une voiture. Après avoir passé le tunnel du Mont-Blanc, nous prenons la direction le Val Veny. Nous avons prévu 4 jours pour faire cette voie avec le moins de pression possible.

Jour 1 (cliquer sur la photo pour l'agrandir).

Après avoir bouclé les sacs, qui sont définitivement bien trop lourds (environ 15kg), nous prenons la direction du refuge Monzino, 1000m plus haut. Une approche déjà très sympa, avec des échelles de via-ferrata permettant d'accéder au refuge. Déjà les géants du coin nous entourent, l'aiguille noir de Peuterey, Les dames anglaises, Le pilier du Brouillard... Autant de noms qui résonnent dans nos têtes.


Jour 2 : Le temps est maussade, et nous mine le morale. Nous partons quand même en direction de l'arête SE de la pointe inominée pour rejoindre les bivouac Eccles. En ce moment le glacier du Brouillard est déconseillé car très crevassé, il faut donc passer par l'arête SE de la pointe inominée. Avec la pluie qui tombe fort par moment et le lichen rendu très glissant, cette course nous pompe déjà beaucoup d'énergie. 8h plus tard nous arrivons au bivouac, il neige. Nous avons entrevu notre voie Du lendemain, et elle est plâtrée de neige. Doute, questionnement, l'après midi sera pleine de remises en question. Nous faisons un aller retour de 2h à la pointe Eccles pour repérer l'approche du lendemain, ça sera par le glacier du Brouillard, malgré son mauvais état. Ce soir nous dormons à 4 dans notre boite à sardines, et nous passons même une bonne nuit grâce à la fatigue accumulée pendant nos 10h de course.


Jour 3 : Le réveil sonne à 3h45. Nous avons passer une nuit spartiate, mais bonne. Nous commençons par un rappel de 20m qui nous dépose sur le glacier du Brouillard, que nous remontons pendant 1h30, sur de la neige/glace bien usante pour les mollets, jusqu'au col Eccles. Ensuite 2 rappels de 50m nous amène sur le glacier du Freney, que nous traversons à droite jusqu'au pied du Pilier du Freney. 4h pour faire cette approche, et nous sommes déjà bien entamés. Le pilier se développe sur 500m, entre 4000m et 4500m d'altitude, et les difficultés vont en augmentant de bas en haut. D'abord du IV, puis du V, puis du V+, puis la chandelle, et ses longueurs d'escalade artificiel complètement verticales, voir déversantes. L'escalade est athlétique, parfois un peu technique en dalle. En tout cas elle est belle, pure et tellement esthétique. L'ambiance est garantie, avec les fesses pendus à 1000m au dessus du glacier du Freney. C'est vraiment bien fatigué que nous finissons le pilier du Freney à 19h. Il est encore temps de rejoindre l'arête du Brouillard avant la nuit, puis le Mont-Blanc de Courmayeur et enfin le Mont-Blanc. On commence donc à remonter, et nous sommes vite rattrapé par la nuit. Une erreur d'itinéraire sous le Mont-Blanc de Courmayeur nous coute une heure (à cette heure ci (22h) elle compte triple). c'est à 23h que nous arrivons au sommet du Mont-Blanc (4810m). La traditionnelle poignée de main se transforme en accolade chaleureuse, on s'en souviendra de cette course. On se tourne vers l'arête des bosses, terrain bien connu de nous deux pour y emmener très souvent des clients, 1h15 plus tard nous sommes au refuge du Gouter à 3815m. Cela fait 20h que nous sommes partis du Bivouac Eccles.

la fameuse longueur d'escalade artificiel
la fameuse longueur d'escalade artificiel

Jour 4 : Arrivé à minuit au refuge du Gouter, après de nombreuses pauses, car très fatigués, on se couche sur les bancs en bois de l'entrée jusqu'à 3h. C'est a cette heure ci que nous pouvons récupérer un lit et profiter de 4h de sommeil profond. Puis c'est la descente jusqu'à Chamonix, et la logistique pour récupérer la voiture en Italie.


Plus qu'une belle croix dans une liste de course, c'était surtout une belle aventure. Partagé à deux bien sur, quand l'engagement est aussi important il est crucial de pouvoir se faire confiance. Mais c'est aussi un voyage au coeur de soit même, de ses craintes, de ses peurs... qui permet de mieux se connaitre. Avec ses qualités et ses défauts. Il faut apprendre à avancer, car ici la sortie se fait par le haut, coute que coute.

 

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